L’intérêt de la valorisation ne réside pas uniquement dans l’anticipation d’opérations financières (levée de fonds, croissance externe, transmission/cession). Ce process permet d’avoir un état des lieux sur la santé financière de l’entreprise, grâce auquel le dirigeant pourra prendre conscience des points d’alertes et des axes d’amélioration de son entreprise en analysant des indicateurs concrets.
Nombreuses sont les situations où l’entrepreneur aura besoin de connaître la valeur de son entreprise, et pas uniquement le jour où il aura décidé de la céder. Cette évaluation de la valeur de l’entreprise sera par exemple nécessaire à l’occasion de l’entrée de nouveaux associés ou de leur sortie par voie de réduction de capital, ainsi qu’à l’occasion d’une restructuration juridique entraînant des apports ou des fusions de sociétés.
Elle sera tout autant indispensable dans le cadre de transmissions familiales dans le cadre de donations ou de successions à la suite du décès du dirigeant. L’évaluation de l’entreprise peut également s’avérer nécessaire dans des situations conflictuelles lors de mésentente entre associés. Enfin, en cas de demande d’information de l’Administration fiscale concernant les bases de calcul de droits d’enregistrement ou de plus-values, il faudra que le chef d’entreprise soit en mesure de présenter un dossier documentant les valeurs retenues.
Il existe différentes méthodes de valorisation, plus ou moins pertinentes en fonction du profil de l’entreprise et du contexte de l’évaluation. La ou les méthodes qui seront retenues par l’évaluateur doivent permettre de fournir une fourchette de valeurs argumentée et non un montant fixe, l’évaluation n’étant pas une science exacte. Dans un contexte transactionnel notamment, la fourchette de valeurs pourra servir de base dans le cadre des négociations entre le cédant et l’acheteur, le prix final tenant compte ensuite des discussions entre les deux parties, de la valorisation des synergies ou d’une situation de marché particulière qui inciteront par exemple l’acheteur à payer une prime par rapport à la valeur estimée par l’évaluateur.
” Tout dirigeant est confronté au cours de la vie de son entreprise à une problématique de valorisation dans un contexte financier, transactionnel, réglementaire ou contentieux. “
Les principales méthodes d’évaluation en vigueur se répartissent en trois familles : patrimoniale, analogique et intrinsèque, basée sur la rentabilité future, chacune présentant des avantages et inconvénients. L’approche « multicritères » est recommandée par les autorités boursières ainsi et l’administration fiscale. Elle constitue l’approche privilégiée dans la pratique par les évaluateurs.
L’approche patrimoniale est une méthode d’évaluation bilancielle reposant sur la situation du patrimoine (actif) et des dettes de l’entreprise à un instant donné. Elle vise à évaluer une entreprise en séparant chaque élément de l’actif et du passif présent au bilan de l’entreprise. Une fois réévalué, le passif est retranché de l’actif, lui aussi éventuellement réévalué afin d’obtenir l’actif net réévalué, aussi appelé situation nette ou actif net comptable. Celle méthode est adaptée aux entreprises ayant une structure bilancielle importante (industrie, SCI, holding financière) mais peu recommandée pour les sociétés à faible intensité capitalistique comme les sociétés de services ou les startup par exemple. A noter que cette approche est utile pour évaluer la valeur de remplacement ou de liquidation de l’entreprise mais s’agissant d’une approche statique n’intégrant pas les éléments du compte de résultat et donc la notion de rentabilité ou le potentiel futur de l’entreprise, elle reflète généralement mal sa valeur « économique ».
L’approche analogique est fondée sur l’hypothèse que des sociétés, présentes sur un même secteur d’activité, sont valorisées de manière comparable par le marché. Cette approche est fondée sur l’ana- lyse des multiples pertinents établis sur la base d’un échantillon de sociétés comparables – soit cotées (multiples boursiers) – soit non cotées si celles-ci ont fait l’objet de transactions (multiples de transaction). La principale difficulté de cette approche réside dans la recherche et le recueil d’in- formations pertinentes et fiables sur des sociétés / transactions avec un degré de comparabilité satisfaisant.
L’approche intrinsèque valorise les actifs d’exploitation d’une société sur la base de ses performances futures actualisées à la date de l’évaluation. Les actifs d’exploitation sont par définition les actifs utilisés dans le cadre de l’activité (et ne tiennent à ce titre pas compte des actifs de placement ou des passifs ou actifs hors exploitation). Cette approche a l’avantage de se rapprocher de la théorie pure (flux). Elle est largement utilisée et permet de réaliser plusieurs scénariis en faisant varier les hypothèses retenues, ce qui lui confère de la flexibilité. En revanche, la difficulté d’établir des prévisions financières fiables dans un contexte macroéconomique toujours plus incertain et la grande sensibilité des résultats aux paramètres d’évaluation retenus (taux d’actualisation, etc.) peuvent fragiliser les conclusions de l’approche. En synthèse, le travail d’évaluation d’entreprise ne se limite pas à définir la fourchette de valeur de l’entreprise par appli- cation « mathématiques » d’une méthode de valorisation. Il doit fournir au dirigeant un argumentaire robuste justifiant la valorisation retenue. A travers ses analyses, l’évaluateur doit mettre en relief l’ensemble des éléments tangibles sur lesquels s’appuie son évaluation et fournir ainsi au dirigeant toutes les clés pour être en mesure d’expliquer clairement la valorisation de son entreprise.
POUR EN SAVOIR + Anne-Lise Debieve – Manager H3P expert en évaluation d’entreprise