Dans plusieurs décisions du 13 septembre 2023, la Cour de cassation a écarté, sur le fondement du droit de l’Union européenne, l’application des dispositions du code du travail concernant l’acquisition de droits à congés payés par les salariés pendant les périodes d’arrêt de travail pour maladie.
Pour rappel, conformément aux dispositions applicables, chaque salarié acquiert 2,5 jours ouvrables (ou 2,08 jours ouvrés) de congés payés par mois de travail effectif.
Il en résulte que :
- Les périodes de suspension du contrat de travail pour cause de maladie et accident non professionnels ne donnent pas droit à l’acquisition de congés ;
- Par exception, les arrêts de travail pour cause de maladie et accident professionnels étant assimilés à du travail effectif, ils permettent l’acquisition de congés payés dans la limite d’un an.
Le 13 septembre 2023, la Cour de cassation est revenue sur ces principes et a invoqué le respect du droit européen relatif au repos des salariés en écartant l’application des dispositions françaises sur le sujet.
Les arrêts rendus reconnaissent qu’un salarié dont le contrat de travail est suspendu en raison d’une maladie ou d’un accident, quelle qu’en soit l’origine, acquiert des congés payés pendant sa période d’absence, sans limitation de durée.
La Cour précise également que :
- les salariés ayant eu des absences avec impacts sur leur compteur de congés payés peuvent se prévaloir de ce revirement de jurisprudence pour solliciter rétroactivement la régularisation des congés payés afférents à leur période d’absence ;
- le point de départ du délai de prescription de 3 ans dont disposent les salariés pour engager une demande de régularisation « doit être fixé à l’expiration de la période légale ou conventionnelle au cours de laquelle les congés payés auraient pu être pris dès lors que l’employeur justifie avoir accompli les diligences qui lui incombent légalement afin d’assurer au salarié la possibilité d’exercer effectivement son droit à congés ».
Il en résulte qu’en cas de contestation il appartient à l’entreprise de démontrer que le salarié a été mis en mesure d’exercer son droit à congés payés afin que la prescription triennale ne puisse être valablement opposée au salarié. Á défaut, il pourrait être soutenu de manière extensive que le salarié puisse solliciter une régularisation de ses congés payés pour toutes ses périodes d’arrêt de travail, sans limite temporelle depuis son embauche.
A ce jour, de nombreuses incertitudes existent concernant la durée sur laquelle doit porter une telle régularisation. Une intervention du législateur dans les mois à venir est attendue afin de clarifier la gestion des congés payés en cas d’arrêt de travail.
Nous vous préconisons de vous conformer, dès à présent, à cette décision et de prendre en compte les périodes d’absence pour maladie pour déterminer le nombre de jours de congés annuels de vos salariés.
Par ailleurs, compte tenu de l’application rétroactive de cette nouvelle position, vous devrez arbitrer entre :
- régulariser les situations antérieures des salariés dès aujourd’hui ;
- attendre qu’un salarié adresse une demande de régularisation avant de procéder au rattrapage.
Notre département droit social reste à votre disposition pour toute question sur l’acquisition des congés payés et pour échanger sur l’impact de ce revirement de jurisprudence.