Le 13 septembre 2023, la Cour de cassation a profondément modifié les règles de calcul des congés payés des salariés en arrêt maladie. Que faut-il en retenir aujourd’hui ? Voici un premier éclairage en prévision de la sortie des décrets à partir desquels les nouvelles règles devront s’appliquer.
RAPPEL DU CONTEXTE
La Cour de cassation a effectivement décidé, le 13 septembre 2023, d’écarter l’application des dispositions du Code du travail actuellement en vigueur en considérant qu’elles ne sont pas conformes au droit de l’Union Européenne. Elle a ainsi considéré que les salariés devaient acquérir des congés pendant leur arrêt maladie (professionnelle ou non) et que le délai de prescription ne commence à courir qu’à partir du moment où l’employeur a mis le salarié en mesure de prendre ses congés payés.
Toutefois, le 8 février dernier, le Conseil constitutionnel a jugé que les dispositions du Code du travail actuellement en vigueur sont conformes à la Constitution.
Le Gouvernement a donc proposé un amendement dans le cadre du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’UE qui a été examiné et adopté dans la nuit du 18 au 19 mars 2024 par l’Assemblée Nationale.
LES PRINCIPALES MESURES À RETENIR
Les principales mesures visent à codifier les différentes orientations données par la Cour de cassation, la CJUE et le Conseil constitutionnel, tout en sécurisant les employeurs.
Concernant les salariés en arrêt de travail d’origine non professionnelle :
ils seront limités à l’acquisition des 4 premières semaines de congés payés par période. Il y aurait donc des règles d’acquisition différentes en matière de congés payés avec les salariés en arrêt de travail d’origine professionnelle (AT/MP) qui continuent d’acquérir leur 5 semaines de congés payés
D’ailleurs, concernant les salariés en arrêt de travail pour AT/MP (donc d’origine professionnelle) :
ils continueront d’acquérir des congés payés au-delà d’un arrêt de travail d’une durée ininterrompue d’un an.
Pour encadrer ces nouvelles disposition :
l’amendement introduit également un délai dit de « forclusion » de 2 ans à compter de la publication de la loi qui impose au salarié qui souhaiterait introduire une action pour réclamer des congés qui auraient dû être acquis au cours de période d’arrêt.
CE QUI SE PROFILE EN CAS DE REPORT DE CONGÉS…
L’amendement cadre le report des congés payés et prévoit une nouvelle obligation à la charge de l’employeur.
Il est prévu que lorsqu’un salarié sera dans l’impossibilité de prendre ses congés acquis pendant la période de prise des congés pour cause d’arrêt de travail, ces derniers feront l’objet d’un report de 15 mois avec une possible rétroactivité depuis le 1er décembre 2009.
Cette période débutera à la date à laquelle le salarié recevra les informations transmises par son employeur postérieurement à sa reprise du travail.
Ainsi, et dès la parution du texte définitif, l’employeur sera tenu d’informer le salarié de retour d’arrêt maladie dans les 10 jours sur ses droits à congés. L’employeur sera dans l’obligation de porter à la connaissance du salarié :
- le nombre de congés dont il dispose ;
- le délai durant lequel ces congés doivent être pris.
Cette obligation nécessitera une formalisation par courrier avec preuve de réception à date certaine pour être réputée satisfaite.
DES PROCHAINES ÉCHÉANCES QUI POURRAIENT MODIFIER LES TEXTES.
Au milieu du mois d’avril, une Commission Mixte Paritaire se réunira pour tenter de trouver un compromis sur l’ensemble du projet de loi « d’adaptation au droit de l’UE ». En cas d’accord, l’adoption définitive par l’Assemblée Nationale et le Sénat aura lieu en suivant.
Toutefois, et à aujourd’hui, il est urgent d’attendre puisque les règles ne sont pas encore claires et établies. D’autant plus qu’il subsiste un vide quant aux situations intervenues entre les arrêts du 13 septembre dernier et la parution de la loi puisque les dispositions ne s’appliqueront que pour les situations qui interviendront à compter de la promulgation de la loi.
Il faut donc rester vigilant puisqu’il est également fort probable qu’une QPC soit introduite pour valider le texte.
Découvrez-en plus sur le sujet en écoutant le podcast de Sylvana Fetzer,
consultante en droit social chez ORCOM.