Le décret n°2023-1428 du 29 décembre 2023, publié en application de l’article L. 313-12-2 du CASF, précise « les modalités par lesquelles l’autorité de tarification peut tenir compte, pour fixer la tarification de l’établissement ou du service médico-social, de la part des reports à nouveau ou des réserves figurant dans son budget et qui ne sont pas justifiés par ses conditions d’exploitation. »
Sont concernés par l’application de ce décret les EHPAD et les ESSMS relevant du 6° de l’article L.312-1 du CASF ainsi que tous les établissements du secteur du handicap.
L’autorité de tarification disposera donc de la possibilité, dans le cadre du renouvellement des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) à compter du 1er janvier 2025, « de tenir compte, pour fixer la tarification de l’établissement ou du service, de la part des reports à nouveau excédentaires ou des réserves figurant dans ses comptes et dont le niveau n’est pas justifié par les conditions d’exploitation résultant des obligations et objectifs fixés par le contrat ».Une telle disposition réglementaire doit être analysée avec précision car elle interroge, notamment sur le principe de «libre affectation » des résultats par l’organisme gestionnaire prévu par le CPOM.
Dans un premier temps, il convient de bien rappeler que seuls les reports à nouveau et réserves concernés sont ceux « issus des produits de la tarification ou des subventions versés à l’établissement ou au service par l’Etat, l’agence régionale de santé, les collectivités territoriales et leurs établissements publics, ou par les organismes de sécurité sociale ».
Il demeure donc indispensable pour les organismes gestionnaires de rester vigilant dans la comptabilisation et le suivi des résultats antérieurs en dissociant notamment les activités sociales ou médico-sociales sous gestion contrôlée, les activités sociales ou médico-sociales hors gestion contrôlée et la gestion propre de leurs autres activités le cas échéant.
Mais le décret prévoit par la suite que « la modulation tarifaire opérée en application de ces dispositions peut porter, le cas échéant de manière inégale, sur les tarifs applicables à tout ou partie des années couvertes par le nouveau contrat. Son impact sur les recettes de l’établissement ou du service ne peut excéder, sur la durée du nouveau contrat, la moitié du montant des reports et réserves injustifiés ». Il faut donc en retenir d’une part, que la prise en compte des reports à nouveau et des réserves reste limitée en volume dans le temps, et d’autre part, qu’il ne s’agira pas de prélèvement direct sur les fonds propres des ESSMS, mais bien d’une diminution des recettes de tarification sur la durée du CPOM.
L’impact de cette disposition ne pourra pas excéder la durée du nouveau CPOM.
Une telle disposition pourrait avoir des conséquences financières significatives pour l’établissement concerné. Car si une baisse des recettes de tarification était constatée, cela aurait pour conséquence de faire apparaitre des résultats déficitaires et de fragiliser la Capacité d’Autofinancement (CAF) de l’organisme gestionnaire.
La décision de l’autorité de tarification doit reposer sur une analyse préalable des derniers EPRD et ERRD en tenant compte des obligations et engagements fixés par le CPOM, ainsi que du projet des établissements concernés et leurs plans pluriannuels d’investissement.
Les postes des fonds propres des ESSMS concernés par cette modulation tarifaire sont les suivants :
- les comptes de report à nouveau excédentaires,
- les réserves affectées à l’investissement,
- les réserves affectées à la couverture du besoin en fonds de roulement (réserve de trésorerie),
- les réserves de compensation des charges d’amortissement,
- les réserves de compensation des déficits.
Précisons que le Conseil d’Etat a validé ce décret du 29 décembre 2023 par une décision du 4 février 2025 rejetant le recours du Synerpa qui visait à obtenir l’annulation de ce décret.
Même s’il paraît difficile d’imaginer que l’autorité de tarification tienne compte de manière systématique de la prise en compte de ces réserves et reports à nouveau dans le cadre du renouvellement du CPOM des ESSMS concernés par ce décret. Il n’en demeure pas moins que les organismes gestionnaires ne doivent pas hésiter à effectuer un état des lieux de leurs hauts de bilan dans le cadre de la préparation au CPOM, et à les réaffecter le cas échéant en lien avec leurs projets et objectifs à venir sous réserve de l’accord de l’autorité de tarification.
Le + ORCOM
Le pôle ESSMS d’ORCOM met son expertise à votre service pour vous éclairer sur toutes ces questions.